« The Historian », Elizabeth Kostova

Laissons les Fées pour aujourd’hui pour aller faire un tour du côté de la Roumanie du XVème siècle, aux alentours de 1450. Dans The Historian, Elizabeth Kostova entraîne ses lecteurs à la poursuite de Vlad Tepes III, dit Vlad l’Empaleur, ou encore Vlad Drakul, plus connu sous le nom de Drakulya ou Drakula, qui inspira (entre autres sources) le Dracula de Stoker.

L’histoire

Le Chaudron de Morrigann: "The Historian", Elizabeth KostovaDans la bibliothèque de son père, une jeune fille découvre un étrange volume à reliure ancienne, dont toutes les pages sont vierges, exceptées les deux du centre, où est dessiné un mystérieux dragon. Son père, tout d’abord peu enclin à lui dire de quoi il s’agit, commence à lui raconter comment ce livre est entré en sa possession à l’époque où il préparait son doctorat sous la direction du Professeur Rossi, un historien renommé. À l’époque, il découvrit que Rossi avait lui aussi un livre semblable, et qu’en bon universitaire, il avait tenté de faire des recherches dessus.

Puis les événements pour le moins « étranges » s’enchaînent : Rossi disparaît, Paul (le futur père de la jeune fille du début) trouve des indices laissant penser que l’auteur de la disparition n’est autre que Drakula lui-même. Il se lance donc à sa recherche, accompagné de Helen, qui se présente comme la fille de Rossi, ignorée par son père. De bibliothèque en bibliothèque, de ville en ville, de pays en pays, ils vont exploiter toutes les pistes dont ils disposent afin de retrouver Rossi, et vont devoir prendre garde à ne pas se retrouver face aux disciples du Prince.

The Historian comporte en fait trois principaux récits, dont deux sont présentés sous forme de lettres, rappelant ainsi la structure du Dracula de Stoker : celui de Rossi, celui de Paul (plus tard, chronologiquement), et celui de la jeune fille (encore plus tard). Les découvertes se transmettent ainsi à la « génération suivante » de possesseur du « livre au dragon », lui permettant de continuer l’enquête.

La démarche derrière la fiction

Écrit par une universitaire, ce roman est intéressant à plusieurs niveaux. Tout d’abord, il parle d’une période obscure de l’Histoire, d’une figure légendaire au sujet de laquelle on ne peut affirmer que peu de choses avec certitude, incitant ainsi le lecteur à douter. Ensuite, on en apprend beaucoup sur l’histoire de l’Est, l’Empire Ottoman, la Valachie et leurs chefs, dont la cruauté dépassait parfois toute fiction. Enfin, après l’avoir lu, vous ne verrez plus jamais les bibliothécaires de la même façon !

Certains doivent sans doute penser : « Oh non ! Encore un truc dans la veine du DaVinci Code ! » Eh bien non, justement ! Le DaVinci Machin, lui, ne se base pas sur des faits historiques, mais plutôt sur des spéculations capillotractées de son auteur, qui pour la plupart ne tiennent pas debout. Dans le cas de Drakula, il est permis d’imaginer certaines possibilités, certaines explications, car ce personnage historique est entouré de mystères, de flou, d’incohérences… The Historian est donc un exemple de fiction écrite à partir d’une période sombre de l’histoire, sans pour autant que l’auteur ait la prétention de le faire dans un style « moi je détiens la vérité ». Si les faits historiques de départ sont avérés, le roman, lui, est une fiction et se présente comme tel.

La traduction française existe !

Ce roman a été traduit en français sous le titre L’Historienne et Drakula, et ce titre mérite un petit commentaire. Il est vrai qu’il est très difficile de traduire un titre, d’autant plus quand il est ambigu, comme c’est ici le cas. En effet, en anglais, « The Historian » peut renvoyer à la fois à Rossi, Paul, Helen, la jeune fille, ou…, car tous ces personnages sont historiens de formation. Et à mon avis, sans vouloir trop en dévoiler (bien que ce soit très tentant !), le titre ne concerne en fait aucun de ces personnages. Mais il est vrai qu’il est possible de comprendre ici le choix du traducteur : on a un terme générique, sans précision, qui peut justement faire référence à plusieurs personnages, mais il impossible en français de garder cette ambiguïté sans gâcher le plaisir du lecteur. On choisit donc de préciser le titre, quitte à ce qu’il soit erroné, et puisque l’histoire est racontée du point de vue de la jeune fille (car c’est elle qui sert de lien), on va en faire le personnage principal, et on décide de la faire apparaître dans le titre.

Cependant, je ne dis pas que la traduction française est mauvaise, je ne saurais me prononcer là-dessus, car je n’y ai jeté qu’un rapide coup d’œil.

(© Morrigann Moonshadow, le 03 septembre 2006. Reproduction partielle ou totale strictement interdite.)

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